Les dirigeants font pire que les colons dans l'exploitation des richesses de Madagascar

“Comme les révoltes populaires sont cycliques à ­Madagascar, tous les dix ans, faudra peut-être attendre la génération Z…”
Ça ne s’invente pas. En fouillant dans mes archives sur randydoit, je me suis surpris à constater que j’ai annoncé le mouvement Gen Z dès 2011 ! C’était en chroniquant “Indignez-vous”, le best-seller de Stéphane Hessel. Ce qui me conduit naturellement à donner mon POV sur les actus du moment.  

Image de couverture de Les dirigeants font pire que les colons dans l'exploitation des richesses de Madagascar
Le drapeau du manga “One Piece”, devenu un symbole de résistance et de liberté à travers le monde en raison de ses thèmes de lutte contre l'oppression et la corruption, résonnent fortement avec la jeunesse actuelle.

Les mouvements de rues ont des vertus de salubrité publique

Les mouvements de rue ont été toujours vu d'un mauvais œil par les autorités. Pourtant, exhiber des banderoles dans la rue entre potes tout en braillant des slogans à la con a des vertus de salubrité publique est une soupape de sécurité qui permet d'évacuer le trop plein de frustration. Les grèves réprimées provoquent ainsi un effet boule de neige dans l'esprit des gens. Autrement dit, son refoulement permanent entraîne une névrose collective, grosse d'une explosion sociale. A Madagascar, les mouvements populaires sont cycliques à Madagascar. Généralement, ils se produisent tous les dix ans.

A chaque génération sa grève. Les baby boomers sont les protagonistes de mai 72 ; La génération X au centre de la longue manif de 1991 ; les milléniaux ont connu 2002 et ont participé au coup d’État de 2009. C’est au tour de la génération Z (1996-2012) maintenant de prendre la relève...

Les Malgaches se sont toujours indignés. Mais à chaque fois, ils s’indignent que leurs ­révoltes débouchent sur une impasse (révolution socialiste, fille bâtarde de mai ’72), à une trahison (1991), à une grosse manipulation (« Premier tour dé vita » de 2002) ou à une désillusion (2009 et son remake de 2018). La déception de la population est à la mesure des espoirs immenses que les politicards ont suscités.

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À chaque fois, on a l’impression de faire du surplace. Le mouvement Gen Z est ainsi une espèce de condensé des anciennes manif’ depuis l'indépendance avec un zeste de '72 (contestation du néocolonialisme, actuellement représenté par un président de nationalité française), une poignée de 1991 (soif de démocratie), une pincée de 2002 (non à la dictature d'un président affairiste et arrogant et à celle de son parti). Sans oublier les scènes de pillages de 2009 dont la formule est simple : bande payée + aile dure du régime + opportunistes de tout bords, tout contents de piller les marchandises des grandes surfaces qu'ils ne pourront peut-être jamais se payer vu la dégradation du pouvoir d'achat depuis 1972. Si ce n'est pas une émeute de la faim, que cela y ressemble...

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Nous ne sommes pas à la hauteur de ce qu’on nous a donné en héritage

Le fait est qu’une fois arrivés au pouvoir, les dirigeants malgaches ne pensent qu’à leurs propres intérêts. Ils font même pire que les autorités coloniales dans l'exploitation à leurs profits personnels des richesses de Madagascar. Chacun détruit à qui mieux-mieux.

Les politiciens détruisent la politique, qu’ils soient opposants ou au pouvoir. La politique n’est plus cette démarche désintéressée pour développer la cité, mais un moyen pour se remplir les poches. Quand ont est dans l’opposition, on connaît par cœur tous les principes de la démocratie. Mais une fois arrivé au pouvoir, on oublie tout pour confondre ses poches avec la caisse de l’État.

Les enseignants détruisent l’éducation. Enseigner n’est plus un sacerdoce, un métier que l’on a choisi parce qu’on croit en la force de l’éducation pour développer le pays. C’est juste un débouché professionnel où l’on a atterri parce qu’on n’a pas trouvé mieux. Les enseignants d’aujourd’hui ne sont plus comme ceux de Papa qui, lorsqu’ils trouvent que leur salaire ne leur suffit plus, reprennent leurs études pour décrocher de nouveaux diplômes en vue d’une promotion. Il y en a alors qui sont passé d’instituteur à professeur d’université. Pour obtenir une augmentation, les enseignants d’aujourd’hui, d’instituteurs à pseudo-chercheurs, préfèrent prendre en otage leurs propres élèves, qui sont manifestement le dernier de leurs soucis, quitte à provoquer une année blanche.

Les médecins et leurs auxiliaires détruisent la médecine et le monde hospitalier en méprisant les patients. Ce qui constitue à la fois un reniement du serment d’Hippocrate et une non-assistance à personne en danger, autrement-dit un crime.

Les forces de l’ordre détruisent la sécurité en louant des armes aux bandits pour arrondir leur fin de mois.

Les magistrats détruisent la Justice pour se remplir les poches au plus vite…

Non, nous n’avons jamais été à la hauteur des héritages que nous ont légués nos raiamandreny.

Le 14 octobre 1958, pour ne prendre que cet exemple, ils étaient 208 raiamandreny, émanant des quatre coins de Madagascar et réunissant toutes les tendances politiques à proclamer un régime République unitaire pour les générations futures. Actuellement, il y a des abrutis qui veulent renier cet héritage en réclamant un fédéralisme sans fondements historique, ni sociologique, encore moins économique. Les fédéralistes, combien de divisions ? Combien de députés et combien de maires sont élus, ou tout au moins se sont présentés, sous l’étiquette fédéraliste ? Un candidat qui se dit fédéraliste s’est effectivement présenté aux présidentielles par deux fois. Il a récolté 0,89% des voix (40.253 votes) en 2013 et 0,98% (48.705 votants) en 2018. C’est le poids du fédéralisme à Madagascar.

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Le pouvoir est volatil. La chute des présidents qui se sont succédé était causée par des dérives autoritaires et autocratiques. Les lois sont écrites de sorte que ceux au pouvoir y sont boulonnés pendant un bon bout de temps avec l'aide de certains militaires dont les bruits de bottes résonnent d'espèces sonnantes et trébuchantes. Il y a donc des cas, comme dans la situation actuelle, où les voix doivent sortir de l'urne pour se faire entendre. Pour remettre le compteur à zéro et réécrire les règles du jeu politique. Pour qu'à l'avenir, le peuple ne sera plus obligé de descendre dans la rue pour réclamer un changement. 

Un tuto pour lancer de pavés sur les forces de l’ordre. Quand manif’ et humour cheminent ensemble. La Gen Z est aussi la génération du stand-up