Avoir une musique dans la tête, on appelle ça des « vers d’oreille »
« Libérée, délivrée… » et je vous laisse la suite. Ne me remerciez pas, j’imagine que bons nombres d’entre vous ont maintenant la musique dans la tête. Je m’excuse, à moitié, mais de toutes façons, si ce n’était pas celle-ci, ce serait sûrement une autre. En effet, si vous êtes comme moi, vous êtes très sensibles aux « vers d’oreille », ces morceaux de musique qui se répètent en boucle dans notre tête. Rassurez-vous, ce n’est pas de la folie, c’est une manifestation du fonctionnement de notre mémoire. Sachez également que ces musiques qui trottent dans la tête peuvent être perçues comme agréables ou non, en fonction des personnes concernées.
On est bien d’accord, il ne s’agit pas de vrais vers. Mais cette musique dans la tête, qui tourne en boucle, et qui ne correspond d’ailleurs qu’à de petits morceaux de la chanson entière, à un nom : le « ver d’oreille ». Cela vient de l’anglais « Earworm », qui est lui-même issu du mot allemand « Ohrwurm ». Ce dernier a été créé par un psychiatre en 1979 pour qualifier ce phénomène de musique qui se répète en boucle dans notre esprit.
Certaines études ont montré que 99% des personnes interrogées avaient eu au moins une fois une musique dans la tête qui tournait en boucle. Fait intéressant, toutes les musiques semblent avoir ce pouvoir d’infection, car des questionnaires menés auprès de volontaires ne montrent que très peu de recoupements entre les musiques citées. Chacun semble avoir donc sa « musique noire ».
Pour autant, il semble que certaines musiques aient une plus grande capacité de rester dans la tête. Cela découle notamment de leurs structures musicales. Les musiques avec un tempo plus rapide que la normale (124 battements par minute, contre 115) ont plus de chance de s’imprimer dans notre cerveau. C'est également le cas des musiques avec une mélodie assez prévisible et facile à enregistrer. Pour illustrer cette caractéristique, des participants d’une étude de 2015 citaient souvent les chœurs de la chanson « Bad Romance » de Lady Gaga.
L’enchainement de notes, avec un intervalle important entre elles, ou les paroles répétitives sont également une spécificité des « vers d’oreille ».
Il en faut peu (« pour être heureux ») pour se retrouver avec une musique dans la tête… Or, quand ces dernières s’installent, elles peuvent rester là parfois des heures, des jours, voire des semaines !
On pourrait penser qu’on a une musique dans la tête lorsque l’on entend cette dernière. Mais non, pas forcément. Parfois, on n’a même pas besoin d’entendre les notes de ladite musique pour se la répéter en boucle. Un rien suffit.
Un mot, un son, voire même un souvenir ou une situation peuvent déclencher l’infection et le « ver d’oreille » se met en route. Or, notre cerveau à tendance à se souvenir d’une tâche inachevée ; c’est ce qu’on appelle l’effet Zeigarnik. N’avoir que des bribes de chanson qui trottent en boucle dans la tête pourrait donner envie au cerveau de terminer le travail. Donc de « chanter » la chanson en entier et il va donc la répéter encore et encore, jusqu’à réussir.
Une musique dans la tête, pas vraiment dans les oreilles
On parle de « vers d’oreille », mais on devrait plutôt dire « vers de cerveau ». Car, en réalité, quand on a une musique dans la tête, elle affecte notre cerveau et pas nos oreilles.
Ainsi, plusieurs zones du cerveau semblent affecter par ce phénomène. Il y aurait notamment le cortex auditif. Cette zone s’active normalement lorsque l’on entend un son, donc typiquement une musique. Or, lorsque l’on est infecté par un « ver d’oreille », on se rend compte que ce cortex auditif est réactivé.
Ainsi, un mot, un son ou un souvenir activent ce cortex auditif et notre cerveau se met à « chanter » tout seul.
Tout le monde ne semble pas affecter de la même manière par les "vers d’oreille". La constitution du cerveau pourrait apporter une explication. Plusieurs études ont ainsi montré que l’épaisseur de certaines zones cérébrales semble liée avec le fait d’avoir plus ou moins souvent une musique dans la tête. Quand l’épaisseur de certaines de ces zones diminue, par exemple dans le cortex auditif, plusieurs IRM ont révélé que les « vers d’oreille » ont plus de chance de survenir.
Plus précisément, cette épaisseur corticale réduite se retrouve dans le gyrus temporal transverse et dans le gyrus frontal inférieur. La première zone est impliquée dans la perception auditive ; l’interprétation des sons par le cerveau. La deuxième joue un rôle dans les processus de mémorisation verbale.
En outre, les personnes qui apprécient avoir une musique dans la tête ont une densité de matière grise plus forte dans une région liée à la mémoire : le cortex parahippocampique. De plus, les personnes qui aiment les expériences et qui sont créatives apprécient les vers d’oreille. En revanche, celles ayant des prédispositions à développer des troubles obsessionnels compulsifs trouvent cela très désagréable.
Guérir de l’infection : plusieurs méthodes
Pour certaines personnes, ce n’est pas un problème d’avoir une musique dans la tête. Au contraire, c’est même un plaisir. Pour d’autres, en revanche, c’est vraiment agaçant. Heureusement, il existe plusieurs solutions pour déloger la musique dans notre tête. À vous de tester !
Il semblerait quand même que les « vers d’oreille » nous affectent lorsque notre cerveau n’est pas concentré sur une tâche. Si nos pensées divaguent, nous sommes plus vulnérables aux musiques qui trottent. Alors, pour les oublier, lancez-vous dans des missions qui demandent toute votre attention.
Des chercheurs du Royaume-Uni ont démontré que… mâcher un chewing-gum était efficace ! Je n’aime pas ça, alors je ne peux pas tester, mais je suis preneuse de vos retours.
Et pour d’autres, le mieux est de soigner le mal par le mal. Donc, pour éliminer la musique qui tourne dans notre tête, il ne vous reste plus qu’à… l’écouter ! Entendre la musique jusqu’au bout permet d’arrêter de se répéter en boucle des morceaux de celle-ci. Notre cerveau n’a plus besoin de chercher à combler les bouts qui manquent, puisque qu’il l’entend en entier.
Il ne vous reste plus qu’à essayer ces astuces si, comme moi, vous n’appréciez pas beaucoup de répéter inlassablement des bouts de chanson et ce, dès le matin…
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