Publié le 16 octobre 2024

Les Malgaches seraient-ils de tendance extrême-droite ?

Constater n’est pas adhérer. Tribune libre que j’ai fait publier dans « Midi Madagasikara » du samedi 28 juin 2024. A lire également, mon article sur le grand remplacement.

Par Randy donny

Image de couverture de Les Malgaches seraient-ils de tendance extrême-droite ?
Affiche électorale de Dorette Andriamanampisoa-Landerer.

Dès 2022, dans « Teorian’ny tandrimo » (La théorie de la toupie), j’ai écrit que « comme dans certains pays d’au-delà des mers, de plus en plus de Malgaches deviennent xénophobes. Je suis convaincu que si un parti d’extrême-droite se crée à Madagascar, comme le Front National ou le Ku Klux Klan, de nombreux Malgaches vont se presser pour y adhérer » (pp. 24).

Avec la dernière percée du Rassemblement National (RN) aux Législatives anticipées françaises, il est curieux de constater que le programme du RN a des similitudes à certains opinions populaires exprimés ces derniers temps à Madagascar.

  • Interdiction aux binationaux d’occuper des postes stratégiques. N’est-ce pas sans rappeler la polémique nationale lors de la présidentielle de 2023 à Madagascar ?
  • Durcissement de la loi sur l’immigration, notamment abrogation du droit du sol et mise en avant de la « préférence nationale ». Combien de fois n’a-t-on entendu des Malgaches appelant à l’expulsion des étrangers aux mœurs et pratiques « étranges » : Chinois, Africains, musulmans… Le massacre des Comoriens en 1976 à Mahajanga n’est pas si loin que ça. Donner la nationalité malgache aux apatrides ? N’en parlons même pas.
  • Raciste ? Le Rassemblement National refuse cette étiquette, tout comme le « andriana » (ou pas) qui refuse que ses enfants se marie à des descendants de serviteurs…

Ceci dit, en France, il est curieux de constater la multiplication de Malgaches devenus sympathisants RN, allant jusqu’à adhérer à ce parti étiqueté pourtant comme raciste. Se présentant sous les couleurs du Rassemblement National, Dorette Landerer Randriamanampisoa a recueilli 42,75% des voix au 1er tour dans la 8ème circonscription des Alpes-Maritimes (Cannes, Mandelieu). Ce n’est pourtant pas une première. En 2007, l’hymne de campagne de Jean-Marie Le Pen était chanté par Isabella Imperatori, née à Madagascar d’un père malgache, repérée en 1997 par Bernard Antony, directeur de la revue « Reconquête » (Zemmour n’a rien inventé).

Pochette d'un disque d'Isabella Imperatori

Certains immigrés sont-ils frappés par le Syndrome de Stockholm, ce phénomène psychologique observé chez des otages ayant partagé longtemps la vie de leur geôlier à sympathiser avec eux et à adopter leur point de vue ? Non, répondent les Malgaches établis de France avec qui nous avons discuté. Il s’agit juste d’une constatation de l’absurdité de ce qu’ils vivent au quotidien. « Dans ma fiche de paie, il y a deux pages rien que pour les retenues consacrées aux charges sociales dont je n’ai jamais bénéficié depuis mon arrivée en France », affirme une Malgache établie en France depuis une vingtaine d’années. Pas suffisamment pauvre pour bénéficier d’une carte vitale et compagnie, et pas suffisamment riche pour tout payer au quotidien. D’un côté, « il y a des gens qui rechignent à travailler, mais qui obtiennent jusqu’à 3000 euros par mois. Ce sont des professionnels des aides sociales, ils connaissent toutes les ficelles pour les obtenir », continue celle qui a attendue d’être en France pour connaître la peur de sa vie : se faire voler son téléphone portable par un délinquant armé d’un pistolet en attendant le métro ! Pourtant, Dieu sait si Antananarivo est réputée pour ses détrousseurs.

Madagascar et les Malgaches, terrain de tous les paradoxes